Dans une interview accordée à Jeune Afrique, l’auteure Djaïli Amadou Amal revient sur les circonstances de la rédaction de ses ouvrages.

Djaïli Amadou Amal, qui a connu dans sa vie deux mariages forcés voit en cela un prétexte pour porter tout-haut le calvaire que vit plusieurs femmes dans les foyers. « Suivant une tradition qui perdure dans le Nord-Cameroun, un homme qui désire une femme peut s’arroger le droit de l’enlever pour l’épouser. Pour s’assurer que rien ne viendra entraver son projet, il la viole, parfois publiquement, ce qui en fait d’emblée son épouse, en tout impunité, sans que nul ne songe à s’en indigner » explique Djaïli Amadou.

La Camerounaise ressortissante de la région septentrionale de son pays est auteure du livre Les Impatientes. Un ouvrage où elle met en avant les affres d’un mariage forcé que connaissent plusieurs jeunes filles. Une thématique qu’elle aborde aussi dans le livre, Cœur du Sahel avec un accent mis également sur ces femmes interdites d’éducation et soumises au bon vouloir des hommes qui les violentent.

A côté de cela, Djaïli Amal évoque le cas des femmes domestiques qui sont souvent des proies pour leurs employeurs et vont jusqu’à être violées par différents membres de la famille.

Face à cette situation, l’auteure veut s’ériger en leur porte-parole car, pour elle, ce que ces femmes et jeunes filles endurent mérite d’être entendu, « l’Etat apparaît assez permissif : pas plus les rapts que les viols ne sont punis. Le sujet reste tabou. Honteuses d’être victimes, elles se meurent dans le silence, ce qui conforte leurs bourreaux dans l’idée que violer une domestique ne prête pas à conséquence, » renseigne Djaïli Amadou Amal.

Dans ses écrits, la lauréate du prix Goncourt des Lycéens 2021, s’appesanti aussi sur des différences ethniques pointant du doigt le problème de xénophobie qui pour elle s’apparente, pour le cas du Cameroun, à être assis sur une poudrière qui peut exploser à tout moment, « la xénophobie est un sujet tellement tabou chez nous que j’ai hésité à en parler. Si seulement 1% parmi les miens comprend ma démarche et y adhère, ce sera déjà une grande victoire. J’exhorte simplement à la tolérance, à l’acceptation de l’autre« .

L’autre solution qu’elle préconise repose sur l’éducation, où elle explique, « mariée de force une première fois à un homme de près de quarante ans de plus que moi, puis, une deuxième fois à un homme violent, je me suis accroché grâce à l’éducation comme une bouée de sauvetage. Il faut encourager les filles non seulement à aller à l’école, mais aussi, à y rester le plus longtemps possible, » conclut Djaïli Amal Amadou.

Paul WANDJI

Marie Claude


Commentaire